Lancement des rencontres BtoB
Jeudi 11 octobre 2018, Lausanne.
Première journée incontournable pour l’industrie suisse de la défense.
A l’initiative du Groupe romand pour le matériel de Défense et de Sécurité (GRPM) , de Swissmem, l’association faîtière des PME et des grandes entreprises de l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (industrie MEM) et du Bureau des affaires compensatoires à Berne, se tenait la première journée BtoB (Business to Business) dans le cadre de l’appel d’offre du programme Air2030.
Pour rappel, le programme Air2030 est en substance le projet d’acquisition par l’armée suisse de nouveaux jets de combat et d’un nouveau système de défense sol-air de longue portée sous la forme d’un arrêté de planification pour un coût maximal de 8 milliards de francs.
Au contraire de la votation de 2014 sur le Gripen, le peuple ne se prononcera cette fois pas sur le modèle d’avion mais uniquement sur l’enveloppe budgétaire souhaitée par le Département de Guy Parmelin.
Suite à l’appel d’offre lancée par Armasuisse en juillet 2017 pour la partie avions de combats, cinq constructeurs sont entrés dans la course.
Saab et son Gripen E, Dassault et son Rafale, Boeing et son FA 18 Super Hornet, Lookheed Martin et son F-35A et Airbus avec l’Eurofighter.
Particularité de cet appel d’offre, l’achat de nouveaux avions de combat devra faire l’objet d’une compensation industrielle à 100%, à savoir que le pays vendeur devra compenser l’achat de la Suisse par des achats d’un montant équivalent auprès de l’industrie suisse.
Dans le jargon, on appelle cela les affaires compensatoires ou l’offset industriel.
C’est ainsi que dans le cadre de l’acquisition des nouveaux avions de combat, les cinq constructeurs sont appelés à rencontrer les sociétés suisses avec lesquelles ils pourront potentiellement conclure des contrats.
L’enjeu est de taille, ces affaires compensatoires représentent près de CHF 8mia pour l’industrie suisse (dont 30% espérés en Romandie) et des possibilités très intéressantes de partenariats à long terme.
Par le biais de ce blog, j’ai décidé de partager avec vous quelques détails de ces journées incontournables pour l’industrie suisse de la défense.
SAAB en première ligne
Retour donc à Lausanne le 11 octobre, à 0800 comme disent les militaires.
L’ambiance est sobre, voire médicale, bien loin de l’image d’Épinal de la foire aux canons avec hôtesses slaves en pantalon treillis et kalachnikov.
Les femmes, j’en compte 2 sur 200, sont en tailleur et ça parle beaucoup suisse-allemand, quand bien même la même réunion s’est tenue la veille à Berne.
Après une introduction par le Président du Groupe romand pour le matériel de Défense et de Sécurité, c’est au Président du Switzerland Business Unit de SAAB d’entrer en scène.
Le discours est rodé, court, impactant.
Le Gripen E, version monoplace, est un avion de dernière génération, économique et facile à manœuvrer et à manutentionner.
Il peut notamment être ravitaillé en essence et munitions en 10 minutes par une équipe réduite et décoller sur une piste de 800 mètres. Pour une présentation en Suisse, l’exemple est parfait.
On en vient ensuite directement à la question des affaires compensatoires. On est là pour faire des affaires, ce n’est pas aujourd’hui que l’on vend l’avion.
Sur ce point, le discours est stratégique avec deux concepts martelés tout au long de la présentation, implantation à long terme et partenariats plutôt qu’achats.
Et SAAB soutient le discours par du concret, 25% des sociétés suisses présentes dans la salle sont déjà des fournisseurs de SAAB, et ce malgré l’échec de 2014, et un autre 20% est en cours de négociation.
De plus, SAAB possède des participations dans au moins quatre sociétés suisses actives dans l’industrie de défense et comme SAAB produit, en plus de ses avions, des voitures, des tanks, des bateaux et même des sous-marins, le potentiel de collaboration est énorme.
Sur l’aspect partenariat, les promesses sont alléchantes. Les sociétés suisses qui participeront au développement du Gripen E, si celui-ci était retenu, verront leurs technologies et produits intégrés au programme Gripen E et donc vendus aux autres pays intéressés par l’avion.
Avec 60 avions en commande pour la Suède, 36 pour le Brésil et trois appels d’offres en cours en au Royaume-Uni, en Finlande et en Bulgarie, le “contrat suisse” pourrait faire des petits.
Fin de la présentation, nous sortons boire un café ou un jus de pommes.
Je vois s’activer les représentants des sociétés suisses qui, dans quelques minutes, débuteront leur BtoB avec l’avionneur. Quinze minutes par société en tête à tête pour conclure, dans une sorte de speed-dating technique en col blanc.
Et si le Souverain disait non ?
Avant de quitter les lieux, voyant toutes ces personnes peaufiner leur speech et les organisateurs régler les derniers détails, me vient à l’esprit cette réflexion : Et si tout ça n’aboutissait à rien ?
En effet, ces rencontres BtoB, fruits de plusieurs mois de travail acharné des organisateurs et des industriels présents précèdent l’analyse des offres par l’armée et plus encore, le probable référendum.
Au bout du compte, il se pourrait bien que tout ce temps et cet argent investis ne servent à rien en cas de nouvel échec devant le peuple. Ce qui m’amène à la réflexion suivante, pourquoi diable le Département fédéral de la défense et des sports n’a-t-il pas pressé pour que l’on vote avant l’appel d’offre ?
Venir en 2020 devant le peuple avec l’argument que tout est déjà réglé et qu’il ne manque que la signature du souverain, c’est prendre un énorme risque. Espérons qu’il soit calculé.
ABE
Bon baiser de Suisse.
l’armée suisse n’a pas d’autre mission que de patrouiller le ciel à la poursuite de quelques pilotes égarés et ne peut justifier les 8 milliards budgétés desquels on peut extraire 1.5 à 2 milliards pour la défense sol-air . Une bonne vingtaine de Gripen fera parfaitement l’affaire dans ce contexte .
Je me demande aussi si le S-400 russe, acquis par l’Inde, ne pourrait pas être évalué comme les autres systèmes anti aériens européens ou américains ?
L’économie réalisée par rapport au budget initial pourrait être avantageusement investi pour des missions plus urgentes dans la cyber défense , le renseignement et autres protections civiles, dont les équipements sont devenus obsolètes .
Puisque M. Parmelin veut faire passer un budget multi pack, autant y inclure les éléments qui concernent la population au premier chef !
Il est vrai que le Grippen E, monomoteur, léger, agile et équipé de munitions conforme à sa mission limitée au territoire suisse me semble le plus adéquat. Couplé a une défense anti-aerienne efficace c’est bien. Mais le tout couplé a une cyber défense performante et actualisée c’est encore nettement mieux, car plus conforme à la réalité plausible.
Effectivement, quitte à demander un crédit extra-ordinaire, le DDPS aurait pu y inclure le cyber, la Suisse accusant un retard abyssale en la matière.
Je vous rejoins sur l’urgence de la cyber-défense. Mais doit-on pour autant mettre de côté la composante aérienne ? Question politique.
S’agissant des systèmes d’armes russes, deux remarques. La première, il existe un problème d’interopérabilité avec les systèmes OTAN, le deuxième, vous l’aurez compris est plus géopolitique.
La photo est belle et on remercie LE TEMPS, oui apparemment, il a rappelé les blogueurs à publier, même si l’avis est contraire.
Dis pas ça pour vous, mais en général.
Enfin, avions de chasse ou pas, l’important est de voler à son rythme, non?
Et ça c’est démocrate
🙂
Oui je remercie le Temps de me laisser cette liberté dans le traitement des sujets. Pour le rythme, on ne peut pas dire que nous nous soyons hâtés.
Dans les Alpes, le Gripen sera à l’aise. Je l’ai vu à Payerne 14 voler au ralenti. Il semblait bien petit par rapport aux autre mais c’était celui qui était capable de voler…le plus lentement.