Mobilisation pour le climat : transformons l’essai !

Les manifestations pour le climat de ce weekend ont fait couler beaucoup d’encre, et ce à juste titre. Cela faisait bien des années qu’on n’avait pas vu un tel engouement populaire pour une cause, un tel réveil de la société civile pour réclamer des changements d’envergure. Ce n’est pas tous les jours que l’on voit plusieurs dizaines de milliers de personnes manifester dans les rues des principales villes de Suisse, et même avec tout le paternalisme et la mauvaise foi du monde il devient difficile de prétendre que les jeunes et moins jeunes qui se mobilisent pour le climat ont simplement voulu sécher les cours un… samedi !

C’est que l’enjeu est de taille : réduire l’impact des activités humaines sur le climat, et donc éviter une potentielle et fort probable catastrophe nous pendant au nez.

La question est maintenant de savoir si cette mobilisation bienvenue est l’amorce d’une prise de conscience durable et de changements sociétaux profonds, ou si comme d’autres elle se heurtera à des difficultés qui finiront par l’essouffler.

Des mobilisations de ce type ont déjà eu lieu de par le passé, et n’ont pas toujours réussi à durer. On se souvient ainsi des milliers de gymnasien-ne-s et d’étudiant-e-s défilant des les rues des villes suisses en 2003, au moment du déclenchement de la guerre en Irak, ou des grandes manifestations – parfois malheureusement entachées par des débordements violents d’une petite minorité – contre la Mondialisation du début des années 2000.

Malgré une forte mobilisation de la société civile pour des causes clairement identifiées : la paix ou un partage plus juste entre le Nord et le Sud de la planète, bien peu de choses ont changé, et les revendications ont fini par se heurter à l’indifférence polie d’une majorité de la classe politique et des institutions.

Il se peut cependant qu’il en aille différemment cette fois ! Car des moyens d’action concrets existent, et doivent être employés afin e faire changer durablement les choses en matière de politique climatique.

Nous avons la chance d’avoir dans notre pays un système de démocratie directe qui permet à la société civile de proposer des changements parfois ambitieux. L’initiative dite ” pour les glaciers” sera lancée d’ici quelques semaines, et demande une réduction drastique de nos émissions de CO2 d’ici à 2050, avec comme objectif la neutralité climatique. Une récolte rapide des 100’000 signatures nécessaires serait un signal fort donné aux Chambres Fédérales, qui doivent remettre l’ouvrage de la “Loi CO2” sur le métier cet automne. Une inscription dans la Constitution du texte de l’initiative obligerait par ailleurs ces mêmes institutions politiques à prendre le taureau par es cornes et à agir concrètement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Il n’y a d’ailleurs pas forcément besoin de contraindre le Parlement à agir. Il peut le faire de son plein gré si on y place des élu-e-s déterminées à lutter contre le réchauffement climatique. Les rues étaient pleines ce samedi de jeunes ou futur-e-s électrices et électeurs. Gageons qu’ils choisiront – comme d’ailleurs leurs aînés sensibles à cette thématique – les candidat-e-s les plus motivé-e-s à mener des politiques ambitieuses en faveur du climat lorsqu’il sera question d’élections fédérales cet automne. La loi sur le CO2 n’a échoué qu’à quelques voix près au Conseil National, et il suffirait de placer le curseur légèrement plus du côté de l’écologie pour voir des résultats concrets dans notre législation.

Enfin, il y a bien sûr les comportements individuels. Si comme cela a été abondamment répété ces derniers temps il serait faux de mettre toute la responsabilité sur les citoyens-consommateurs que nous sommes et qu’une action étatique forte est nécessaire, il n’en reste pas moins que nous pouvons faire changer bien des choses. Privilégier les transports en commun à la voiture ou à l’avion, consommer local et de saison, renoncer à certains achats “inutiles” et réparer plutôt que de jeter tout objet ou appareil ne fonctionnant plus à la perfection. Autant de gestes simples, qu’on nous rabâche depuis des années mais dont l’impact est réel et au final peu contraignant.

Bref, nous avons toutes les cartes en main pour faire d’une mobilisation lancée par une jeune fille suédoise au courage imposant le respect une véritable prise de conscience globale et un changement sociétal majeur. Ne nous laissons pas échapper cette opportunité !

Alberto Mocchi

Alberto Mocchi est député vert au Grand Conseil vaudois et Syndic de la commune de Daillens, dans le Gros de Vaud. À travers son blog, il souhaite participer au débat sur les inévitables évolutions de notre société à l'heure de l'urgence écologique.

4 réponses à “Mobilisation pour le climat : transformons l’essai !

  1. Yes, think global, act local
    Ceci dit, les suisses vivent à 30% de la chimie (que l’on retrouve dans les eaux, ou de la BNS qui soutient le barril schiste US).
    Alors doucement les rêves, c’est dommage pour vous les jeunes, mais qui sait, un vrai changement grâce à vous?

  2. Merci pour votre article personnellement, je pense que la situation est déjà dépassée et que nous avons déjà perdu énormément de notre environnement; ce qui est perdu ne pourra être récupéré (un glacier fondu, disparu, ne peut être reconstruit). Il s’agirait donc peut être de parler de ces pertes, de les accueillir et d’accueillir les émotions qui vont avec. Les comportements individuels et associatifs peuvent atténuer les chocs et permettre de se réconforter face à ce qui se passe déjà et de se préparer à ce qui va se passer. Mais je ne pense pas que ce soit une bonne idée d’éviter de dire que l’on va aller de toute façon dans le mur et qu’on a déjà commencé à rentrer dans ce mur. Il y a déjà des immigrations traumatisantes en raison des changements climatiques; il y a déjà des animaux disparus etc… . Pourquoi ne pas changer de discours et parler de ce qu’on a perdu et de ce que nous perdons tous les jours (la banquise ne va pas se reconstruire, les peuples premiers qui ont disparu suite à la perte de leurs terres ne vont pas réapparaître ) ; pour pouvoir se rallier à la souffrance des autres êtres de la terre (animaux, plantes, arbres, etc.), encore faut-il l’éprouver soi-même; éprouver cette perte. Peut-être ensuite pourrons nous faire le deuil de la toute puissance de la raison, de la technologie et du progrès économique et vivre les émotions relatives à notre rencontre avec les limites de la terre.

    1. Merci à vous !
      Il est effectivement essentiel de se préparer également à ce qui est désormais malheureusement inévitable… Mais essayons de tout faire pour sauver ce qui peut encore l’être, car nous sommes encore à temps si il y a un vrai sursaut sociétal !

  3. Les lycéens processionnaires
    Mais bien sûr! Ils ne peuvent pas savoir. Leur éveil au monde ne date évidemment que de quelques années. Rachel Carson n’est pas de leur génération. Il serait a fortiori déplacé d’évoquer Malthus. Le rapport Meadows est d’un autre âge. Ont-ils vent que le GIEC est une création Thatcher-Reagan, visant à juguler le militantisme écologique? (désopilant fiasco, tout à fait digne d’une épicière et d’un cow-boy!).
    Ils découvrent soudain les réalités de notre époque, pensent que personne n’en est conscient, entendent derechef sauver la planète, et intiment aux autorités l’ordre d’agir de toute urgence, avec une ardeur et une outrecuidance juvéniles réjouissantes.
    Mais pour faire quoi exactement? Rien de nouveau, si l’on en juge par leur catalogue rabâché de mesures en échec depuis plus de 50 ans. Il y peu d’intelligence à défiler grégairement, sans la moindre perspective d’une amorce de solution. Autrefois, les habitants de Naters organisaient des rites propitiatoires pour stopper la crue du glacier d’Aletsch … La raréfaction et l’emploi parcimonieux des ressources constituent un challenge d’une complexité inouïe. Quand près de 85% de notre énergie sont actuellement d’origine fossile, nul besoin d’une maturité pour comprendre que le combat contre l’inertie naturelle du système demandera beaucoup de temps et de discernement.
    Ce qui est nauséabond dans ces protestations, ce n’est pas l’attitude de notre jeunesse. C’est l’appui inconsidéré d’une bande de pseudo-intellectuels impuissants – politiques, journalistes, essayistes, opportunistes de tout poil, verts frelatés, soixante-huitards décatis, … – qui récupèrent sans scrupule un mouvement de bonne foi.

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