Elections italiennes : une gauche divisée

3ème volet de la série sur les élections italiennes du 4 mars prochain, avec aujourd’hui un focus sur la troisième grande force politique en compétition : la gauche, et plus précisément sa principale formation, le “Parti Démocrate”, ou “PD”.

Un parti qui était montré comme exemple par les autres socio-démocrates européens avec sa victoire éclatante aux élections européennes de 2014 ( plus des 40% de voix) et son jeune et charismatique chef Matteo Renzi, et qui est aujourd’hui dans une situation pour le moins délicate. 

Si comme le disait Giulio Andreotti, ancien Premier Ministre et  figure politique incontournable et controversée de la deuxième moitié du XXème siècle, “le pouvoir use…qui ne l’a pas”, il laisse tout de même derrière lui son lot d’affaires, de scandales et autres promesses non tenues qui marquent l’électorat.

Le PD a remporté les dernières élections générales en 2013, mais contrairement à ce que prédisaient les sondages, il n’a pas obtenu de majorité absolue, ce qui a poussé son Secrétaire de l’époque, Pier Luigi Bersani, à la démission et a contraint le parti à s’allier avec une petite formation de centre-droit pour former un gouvernement.

Après un bref passage à la tête du pays d’Enrico Letta, c’est Matteo Renzi qui prend le relais, et promet de “rotammare“, ou “envoyer à la casse” l’ancienne politique. Tout lui réussit au début, et il vole de succès en succès face à une droite divisée et sans leadership et à un Mouvement 5 étoiles peinant à tirer son épingle du jeu.
Il a notamment réformé le code du travail en le rendant plus libéral, mis en place un système très discuté de subsides de 80 euros par mois pour tous les ménages avec moins de 1500 euros de revenu, ou encore instauré une sorte de “pacs” pour personnes de même sexe. Il a par contre buté contre la réforme du droit de la citoyenneté, visant à instaurer un droit du sol pour les jeunes issus de l’immigration, qui est resté bloqué dans sa phase parlementaire.

Comme tout jeune premier, il a catalysé sur lui les attaques de l’opposition, mais aussi de certains membres et élus de son parti, qui trouvaient ses politiques trop centristes. On n’était pas pour ou contre le gouvernement ou ses politiques, on était pour ou contre Renzi. Et c’est là que la machine s’est grippée.

Son grand projet de réforme des institutions, qui visait notamment à supprimer le Sénat et à amincir le système politique italien, n’a pas passé la rampe en décembre 2016 d’un vote populaire qui s’était transformé en véritable référendum sur sa personne.

Renzi a donc démissionné de son poste de Premier Ministre, mais est resté à la tête de son parti. Il a tout fait pour pousser à un retour rapide aux urnes pour renouveler les Chambres ( il est courant en Italie de ne pas attendre la durée entière d’une législature pour voter à nouveau) et prendre sa revanche, mais n’y est pas parvenu.

Entre temps, les nuages ont commencé à s’amonceler au dessus de sa tête et de celle de sa garde rapprochée, avec notamment le scandale de la faillite de la banque Eturia, qui avait été renflouée par le gouvernement italien en 2015 et dont l’un des administrateurs était le père de Maria Elena Boschi, ministre du gouvernement Renzi.

Plusieurs membres historiques et influents du parti, parmi lesquels l’ancien Premier Ministre Massimo D’Alema, Pier Luigi Bersani ou encore le Président du Sénat Pietro Grasso  ont par ailleurs quitté le navire pour rejoindre une nouvelle formation plus à gauche : “Liberi ed Uguali”.

C’est donc en position de relative faiblesse que la gauche italienne se prépare au scrutin du 4 mars. Crédité de 22% des intentions de vote, et ne pouvant pas compter sur des alliances solides ( les petits partis de sa coalition ne devraient pas dépasser les 4-5% de votes cumulés) le PD risque fort de devoir laisser sa place de premier parti du pays à une autre formation.

Reste à savoir si, comme en 2013, il profitera d’une “alliance de raison” pour créer un gouvernement de coalition, cette fois avec le parti “Forza Italia” de Berlusconi. Bien entendu, les leaders des deux partis écartent avec véhémence cette possibilité, mais qui sait s’ils seront toujours du même avis une fois le 4 mars passé…

 

 

Alberto Mocchi

Alberto Mocchi est député vert au Grand Conseil vaudois et Syndic de la commune de Daillens, dans le Gros de Vaud. À travers son blog, il souhaite participer au débat sur les inévitables évolutions de notre société à l'heure de l'urgence écologique.